Coquille Saint-Jacques


Dans l’Antiquité, la coquille est symbole d’Amour (coquille de Vénus). Elle protège des mauvais sorts et des maladies. On place des coquilles au côté des dépouilles mortelles en guise d’ornement ou d’offrande mortuaire. On en a ainsi retrouvé à Paris dans les tombes d’un cimetière mérovingien, bien avant la découverte du tombeau de saint Jacques à Compostelle.

Au XIIe siècle, Compostelle s’approprie la coquille. Dans le Veneranda dies, sermon du Codex Calixtinus, on peut lire ceci : « Les pèlerins qui reviennent de Compostelle rapportent des coquilles, qui signifient les bonnes œuvres… Il y a dans la mer de Saint-Jacques des poissons communément appelés vieiras qui ont sur deux côtés des protections en forme de coquilles, entre lesquelles se cache un poisson analogue à l’huître. Les valves de la coquille sont formées comme les doigts d’une main (les Provençaux les nomment nidulas, et les Français crousilles).

La coquille est certes vendue à Compostelle au XIIe siècle, mais elle l’est également ailleurs, en particulier au Mont Saint-Michel. En 1377 encore, lorsque l’Empereur Charles IV vient en visite à Paris en 1377, le roi lui ” envoie des coquilles parce qu’il est pèlerin ;”, ce qui indique bien que la coquille est encore un insigne commun à tous les pèlerins. Progressivement pourtant, les représentations iconographiques de l’apôtre saint Jacques adjoignent systématiquement une coquille, qui sur la besace, qui sur le chapeau. En 1490, les toulousains identifient de cette façon une tête peinte à fresque comme étant celle de ” saint Jacques pour ce que au front a une coquille”.

A partir du XVIe siècle, il semble que les pèlerins de Compostelle, plus nombreux qu’ils n’ont jamais été, augmentent considérablement le nombre de coquilles qu’ils portent sur leur costume. C’est ce que souligne ce dialogue des Colloques d’Erasme ; écrits en ce début du XVIe siècle : « Comme tu as un aspect étrange ! couvert de coquilles imbriquées, tout garni d’images d’étain et de plomb, paré de colliers de paille. A tes doigts pendille un rosaire auquel

est accrochée une série de serpents ». Aucun rituel de pèlerinage ne mentionne la coquille parmi les insignes remis au pèlerin, pour la bonne raison qu’à l’origine, le pèlerin devait lui-même ramasser sa coquille sur les plages…Dit-on…car les textes ne parlent que de coquilles-souvenirs vendues sur les lieux pèlerins, parfois bien éloignés de la mer : coquilles naturelles, peintes ou reproduites en métal plus ou moins précieux.

L’un des 23 miracles accomplis par saint Jacques à Compostelle attribue à cette coquille des vertus curatives : un chevalier atteint d’une affection de la gorge est guéri par l’imposition de la coquille d’un pèlerin sur la partie malade. Au retour de Compostelle, on fixe la coquille dans la maison, ou à l’extérieur, près du lit ou sur la porte des étables, près des ruches ou des abreuvoirs. Dans les champs, elles éloignent les mauvaises herbes, les souris et la vermine. Elles libèrent des pouvoirs magiques. Les coquilles immergées dans l’eau et le vin fournissent une boisson thérapeutique aux malades.

La coquille évoque les eaux où elle se forme et participe du symbolisme de la fécondité propre à l’eau. Son dessin et sa profondeur rappellent l’organe sexuel féminin.